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Levée de fonds en Série A : les nouveaux critères des VCs en 2025

De la croissance à tout prix à la croissance qui paie

Le paysage du capital-risque a traversé une période de recalibrage profond. Après l’euphorie des années 2021-2022, une nouvelle ère de prudence et de rationalité s’est installée. L’année 2024 a marqué une stabilisation sur des fondations redéfinies, où la qualité et la viabilité à long terme priment sur la simple vélocité.

Pour la French Tech, le pic de 13 milliards d’euros levés en 2022 a laissé place à un « retour à la norme » avec près de 7 milliards d’euros en 2024. Le premier semestre 2025 confirme cette tendance avec des tensions plus marquées, notamment un effondrement du financement d’amorçage.

Dans ce contexte, la levée de fonds en Série A a muté. Elle n’est plus la simple validation d’une traction initiale mais l’approbation d’un modèle économique démontrant sa capacité à croître de manière saine et durable. La question des investisseurs a changé : elle n’est plus « À quelle vitesse croissez-vous ? » mais « Avec quelle efficacité croissez-vous ? ».

La rentabilité et l’efficacité du capital (capital efficiency) ne sont plus des objectifs lointains mais des prérequis. Comme le résume Jean de La Rochebrochard, Managing Partner chez Kima Ventures, l’obsession de l’entrepreneur doit être le rendement :

« Si je vous confie 1€, comment allez-vous faire pour qu’ils génèrent 2, 5, 10, 15 ? ».

Cet article fournit une grille de lecture exhaustive des nouveaux standards de la Série A pour 2025-2026. En s’appuyant sur les données les plus récentes et les analyses des principaux acteurs du marché, il décrypte les benchmarks quantitatifs et qualitatifs, ainsi que les nouvelles exigences en matière d’IA, d’ESG et de conformité. C’est le nouveau manuel de la croissance qui paie.

⚠️ – Avertissement :
Cet article est à but informatif et ne constitue en aucun cas un conseil en investissement. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures. Les investissements en capital-risque présentent un risque de perte en capital partielle ou totale.

François Wantz Rédacteur en Chef de Finsquare

François Wantz

Cet article a été rédigé par François Wantz, Directeur de la publication pour le média Finsquare.


Le marché du capital-risque en 2025 : moins de deals, plus de sagesse

État des lieux chiffré (France & Europe)

Le marché du capital-investissement français a montré une reprise en 2024, avec 26 milliards d’euros investis. Cette dynamique globale masque cependant une réalité plus complexe pour les startups en phase de démarrage.

L’année 2024 s’est conclue sur un total de 7 milliards d’euros levés par la French Tech, un montant en nette baisse par rapport au pic historique de 13 milliards en 2022. Ce chiffre marque la fin de « l’argent facile » et un retour à des niveaux comparables à ceux de 2020-2021.

Le début de l’année 2025 accentue cette prudence. Au premier trimestre, le marché européen a enregistré une hausse de la valeur totale des transactions (17 milliards d’euros), mais sur un nombre de tours de table en baisse. Ce phénomène illustre une stratégie claire : les investisseurs privilégient la qualité à la quantité, concentrant leurs capitaux sur un nombre restreint d’entreprises jugées plus solides.

En France, le décrochage est spectaculaire. Le premier semestre 2025 a été marqué par une chute de 60% du nombre d’opérations et de 34% des montants levés par rapport à la même période en 2024. La cause principale est une contraction violente du financement d’amorçage. Paul-François Fournier de Bpifrance note un « essoufflement du soutien aux jeunes pousses ».

Ce « flight to quality » se traduit par une concentration des capitaux sur des entreprises plus matures et des secteurs stratégiques. Les méga-levées sont presque exclusivement réservées à des champions de la Deeptech ou de l’IA, comme Loft Orbital (170 M€) ou Alice & Bob (100 M€). Cette polarisation a un effet d’éviction : l’IA « aspire une bonne partie de la capacité d’investissement des fonds », laissant moins de capital disponible pour d’autres secteurs.

Psychologie des investisseurs

La psychologie des VCs en 2025 est façonnée par trois facteurs principaux :

  • Un environnement macroéconomique incertain (tensions géopolitiques, taux d’intérêt élevés).
  • Un manque de liquidité, car le marché des sorties (cessions, introductions en bourse) reste atone.
  • Un recentrage sur les fondamentaux économiques des entreprises.

Les processus de due diligence sont devenus plus longs et plus exigeants. L’objectif des VCs a évolué : l’hyper-croissance n’est plus la seule boussole. Une stratégie claire est d’accélérer l’atteinte de la profitabilité des startups en portefeuille afin de faciliter des sorties vers des fonds de Private Equity. Le chemin vers la rentabilité est devenu une condition pour assurer la liquidité future de l’investissement.

Le déplacement de la « Vallée de la mort » et le marché à deux vitesses

L’analyse de ces dynamiques révèle deux évolutions structurelles majeures.

Premièrement, la « vallée de la mort », cette période critique où une startup risque de mourir faute de financement, s’est déplacée. Historiquement située avant le premier financement, elle se trouve désormais entre le seed et la Série A. Les startups doivent survivre plus longtemps avec moins de ressources pour atteindre les métriques très élevées exigées en Série A.

Deuxièmement, un marché à deux vitesses se dessine nettement :

  • D’un côté, les startups dans des secteurs jugés stratégiques (IA, défense, deeptech, climate tech) continuent d’attirer des capitaux importants, à l’image de Mistral AI ou Helsing.
  • De l’autre, les entreprises des secteurs plus traditionnels (SaaS B2B, e-commerce, fintech) font face à une compétition accrue pour un capital plus rare. Pour elles, l’excellence opérationnelle et une efficacité du capital irréprochable ne sont plus des atouts, mais des conditions de survie.

Les nouveaux standards quantitatifs : métriques de croissance efficace

Si la croissance reste le moteur du capital-risque, sa nature a changé. Les VCs ne financent plus une courbe ascendante à n’importe quel prix. Ils investissent dans une machine de croissance efficace dont la viabilité est prouvée par des métriques robustes et auditées.

ARR et croissance : les fondamentaux réajustés

Le Revenu Annuel Récurrent (ARR) demeure la métrique phare pour les entreprises SaaS. Pour une Série A en 2025, le consensus du marché se situe dans une fourchette de 1 à 3 millions d’euros d’ARR.

Plus que le montant brut, c’est la qualité de cet ARR qui est scrutée :

  • Sa prévisibilité.
  • Sa diversification (pas de dépendance excessive à quelques clients).
  • Sa marge brute.

En matière de croissance, un taux de 2,5x à 3x d’une année sur l’autre (YoY) est considéré comme un signal d’excellence. Au niveau mensuel, une croissance de 15% à 20% (MoM) démontre une forte traction. Cependant, un chiffre brut ne suffit plus ; il doit être analysé au regard des capitaux dépensés pour l’atteindre.

L’efficacité du capital (Capital Efficiency) : le critère roi en 2025

L’efficacité du capital est devenue la métrique la plus importante. Elle mesure la capacité d’une startup à transformer chaque euro investi en ARR et marque la fin de l’ère de la « croissance à tout prix ». Plusieurs ratios permettent de la quantifier.

Métrique clé 1 : Burn Multiple

Le Burn Multiple est l’indicateur le plus direct de l’efficacité opérationnelle.

  • Définition : Il divise le « Net Burn » (consommation nette de cash) par le « Net New ARR » (nouvel ARR généré) sur une même période.
  • Formule : Burn Multiple = Net Burn / Net New ARR
  • Interprétation : Il répond à la question : « Combien d’euros devez-vous brûler pour générer un euro de nouvel ARR ? ».
  • Benchmarks Série A :
    • Excellent : Inférieur à 1x.
    • Bon : Entre 1x et 1,5x.
    • Préoccupant : Supérieur à 2x.

Métrique clé 2 : Cash Conversion Score

Ce score, aussi appelé Burn Efficiency Index, offre une vision globale du retour sur le capital investi.

  • Définition : Il divise l’ARR actuel par le total du capital levé, net du cash restant en banque.
  • Formule : Cash Conversion Score = ARR / (Total Capital Levé - Cash en banque)
  • Interprétation : Il mesure le retour sur investissement (ROI) global des capitaux injectés.
  • Benchmarks :
    • Bon : Entre 0,5x et 1,0x.
    • Excellent (« Best-in-class ») : Supérieur à 1,0x.

Métrique clé 3 : La « Rule of 40 »

Cet indicateur mesure l’équilibre entre croissance et rentabilité.

  • Définition : C’est la somme du taux de croissance de l’ARR (%) et de la marge d’EBITDA (%).
  • Formule : Rule of 40 = Taux de Croissance ARR (%) + Marge d'EBITDA (%)
  • Évolution et Benchmarks : Auparavant réservée aux entreprises matures, elle est pertinente dès 5 M€ d’ARR. Un score supérieur à 40% est le signe d’une entreprise saine. Selon le benchmark de Serena Capital, les plus performantes atteignent même une « Rule of 60+ ».

Unit Economics : la preuve de la viabilité du modèle

Les unit economics dissèquent la rentabilité au niveau de chaque client. Des unit economics solides prouvent que le modèle d’affaires est intrinsèquement profitable.

  • Ratio LTV/CAC : C’est le ratio fondamental. La Lifetime Value (LTV), ou valeur vie d’un client, doit être au minimum 3 fois supérieure au Customer Acquisition Cost (CAC). Un ratio de 4:1 ou 5:1 est un signal d’excellence.
  • CAC Payback Period : Cette métrique mesure le temps (en mois) nécessaire pour rembourser le coût d’acquisition d’un client. Pour une Série A, un CAC Payback inférieur à 12 mois est un objectif solide.
  • Rétention & Churn : La capacité à retenir les clients est un puissant levier d’efficacité. Le Net Revenue Retention (NRR) est un indicateur clé. Un NRR supérieur à 110-120% est attendu, prouvant que l’entreprise génère de la croissance organique sur sa base installée.

Tableau de benchmarks SaaS européens pour la série A (ARR 1-5 M€)

Ce tableau synthétise les exigences pour les startups SaaS européennes au stade de la Série A.

MétriqueMédiane (ARR 1-5M€)Top Quartile (Objectif Série A)
Croissance Annuelle (YoY)100%> 150%
Net Revenue Retention (NRR)105%> 120%
Burn Multiple1.5x< 1.0x
Rule of 4030%> 40% (voire 60%)
ARR par employé (APE)100k€ – 200k€> 150k€


Les critères qualitatifs intemporels, réévalués pour 2025

Au-delà des tableurs et des ratios, la décision d’investissement en Série A repose toujours sur une conviction profonde. Cette conviction est portée par des éléments qualitatifs dont la grille de lecture a évolué pour s’adapter au nouveau contexte économique.

L’équipe fondatrice : la résilience comme compétence clé

Plus que jamais, les VCs investissent dans des équipes avant d’investir dans des produits. L’évaluation va bien au-delà des CVs et des expériences passées.

  • Résilience et adaptabilité : Dans un environnement volatile, la capacité des fondateurs à naviguer dans l’incertitude et à faire preuve de résilience est devenue la compétence la plus recherchée. Les investisseurs cherchent des preuves de cette capacité dans leur parcours et leur obsession pour le client.
  • Maîtrise des données : Une équipe qui ne maîtrise pas parfaitement ses métriques est immédiatement disqualifiée. Les fondateurs doivent pouvoir discuter en profondeur de leur Burn Multiple, de leur CAC Payback ou des leviers de leur NRR. C’est la preuve d’une gestion rigoureuse.
  • Complémentarité et stabilité : Une équipe déséquilibrée ou dont les rôles sont flous est un « red flag » majeur. Les VCs évaluent la dynamique interne, la vision partagée et la capacité de l’équipe à attirer et retenir les talents, un indicateur clé de la qualité du leadership.

Un critère de plus en plus formalisé est la « coachability ». Dans un marché où les erreurs coûtent plus cher, la capacité des fondateurs à écouter et à intégrer le feedback est cruciale. Un fondateur dogmatique, même avec de bonnes métriques, représente un risque élevé.

La « défendabilité » du modèle (Moat) : plus que de la technologie

L’avantage concurrentiel durable, ou « moat », reste au cœur de la thèse d’investissement, mais sa définition s’est élargie.

Si la technologie propriétaire reste un atout, les VCs sont conscients que cet avantage peut être éphémère. Ils recherchent des « moats » plus larges et plus difficiles à répliquer :

  • Effets de réseau : La valeur du produit augmente avec le nombre d’utilisateurs.
  • Marque forte : Une notoriété et une confiance qui créent une préférence client.
  • Accès exclusif à des données : Un jeu de données propriétaire qui améliore continuellement le produit.
  • Intégration profonde : Des coûts de changement (switching costs) élevés pour le client.

Une stratégie de Product-Led Growth (PLG), où le produit est le principal moteur d’acquisition, est une preuve puissante de « défendabilité ». Elle démontre un product-market fit exceptionnel et une efficacité intrinsèque du capital.

Le marché et la stratégie Go-to-Market (GTM) : de la vision à la traction

La taille du marché et la stratégie pour le conquérir sont des piliers de l’évaluation.

  • Validation du marché : Un Total Addressable Market (TAM) de plusieurs milliards est nécessaire, mais insuffisant. Les VCs exigent des preuves de traction sur le Serviceable Obtainable Market (SOM), la part de marché que la startup peut raisonnablement atteindre.
  • Clarté de la stratégie GTM : Le plan d’acquisition client doit être crédible, chiffré et déjà en cours d’exécution. Les VCs veulent voir un « playbook » qui a fait ses preuves à petite échelle et qui peut être déployé à grande échelle grâce aux fonds de la Série A.

Les nouveaux piliers de la Due Diligence : IA, ESG et conformité

Trois thématiques sont devenues des piliers incontournables de la due diligence en Série A. Une startup qui n’a pas une stratégie claire sur ces trois fronts est aujourd’hui considérée comme incomplète et présentant un niveau de risque élevé.

L’intégration de l’IA : du Buzzword à la création de valeur

L’Intelligence Artificielle a attiré l’essentiel des capitaux en 2024 et 2025. Cette abondance a rendu les investisseurs particulièrement avertis et le « grand tri » est en cours pour distinguer les projets réellement innovants des simples arguments marketing.

Les VCs différencient désormais clairement une startup qui utilise une simple API externe (IA « en couche mince ») d’une autre qui développe une technologie propriétaire basée sur des données uniques. Seule la seconde approche crée un avantage concurrentiel durable.

Les questions clés des VCs en 2025 sont :

  • Création de valeur : Votre solution IA résout-elle un problème client 10 fois mieux, plus vite ou moins cher qu’une solution existante ?
  • Avantage data : Disposez-vous d’un accès unique à des données qui vous permet d’entraîner vos modèles de manière différenciante ?
  • Boucle de rétroaction : Votre modèle s’améliore-t-il à chaque nouvelle utilisation, créant une boucle vertueuse (plus de données > meilleur produit > plus d’utilisateurs) ?
  • Impact sur les coûts : Quel est l’impact de l’IA sur vos marges brutes ? Un modèle IA trop coûteux est un signal d’alarme.

La stratégie ESG : du levier de performance à la contrainte réglementaire

Loin d’être une simple case à cocher, la stratégie Environnementale, Sociale et de Gouvernance (ESG) est un critère d’investissement à part entière. Une enquête de PwC a révélé que 69% des sociétés de gestion considèrent l’ESG comme un facteur essentiel de création de valeur.

Les VCs attendent une approche structurée et mesurable :

  • Environnemental (E) : Une mesure, même simplifiée, de l’empreinte carbone (Scope 1 et 2 a minima) et une feuille de route pour sa réduction.
  • Social (S) : Des politiques claires en matière de Diversité, Équité et Inclusion (DEI), avec des indicateurs de suivi (ex: parité), et une conformité RGPD irréprochable.
  • Gouvernance (G) : Une gouvernance transparente, un conseil d’administration équilibré et une gestion proactive des risques éthiques, notamment ceux liés à l’IA (biais, transparence).

La montée en puissance de réglementations européennes comme la SFDR et la CSRD oblige les fonds à reporter sur la performance ESG de leurs portefeuilles. Ils exigent donc de leurs participations qu’elles soient en mesure de fournir ces données, faisant de la maturité ESG un prérequis.

La maturité réglementaire : anticiper pour mieux régner

La complexité de l’environnement légal exige des startups une anticipation accrue.

  • Conformité proactive : La maîtrise des cadres réglementaires spécifiques (ex: DORA pour la Fintech, AI Act pour l’IA) n’est plus une option. Une approche proactive est une preuve de sérieux et de réduction des risques futurs.
  • La table de capitalisation (Cap Table) : C’est un point de vigilance fondamental et l’un des « red flags » les plus rédhibitoires. Une Cap Table « propre », simple et bien documentée, est un signe de bonne gouvernance. Une structure complexe ou désordonnée peut ralentir, voire tuer un deal.

Cas pratiques : leçons de levées de fonds récentes

L’analyse de tours de table récents permet d’illustrer concrètement l’application des nouveaux critères d’évaluation par les investisseurs.

Analyse de succès #1 : Swan (Fintech, Série B de 42 M€)

Swan, spécialiste de la finance intégrée (Banking-as-a-Service), a réussi une levée de fonds significative dans un secteur de la fintech pourtant sous pression.

Le marché de la finance intégrée, évalué à 72 milliards de dollars en Europe, offre un potentiel de croissance massif, avec seulement 20% de cette somme actuellement adressée.

Facteurs clés du succès :

  • Traction commerciale irréfutable : L’entreprise a prouvé son product-market fit avec des clients de premier plan (Pennylane, Indy, Agicap) et un volume de transactions impressionnant de plus de 1,5 milliard d’euros par mois.
  • Vision claire et marché vaste : Swan a articulé une vision limpide : devenir le leader européen sur un marché profond et en forte croissance, convainquant les investisseurs de sa capacité à y prendre une part significative.
  • Exécution et ambition : La levée n’était pas une fin en soi, mais le moyen de financer un plan d’action précis : accélérer l’innovation produit, l’expansion géographique en Europe et recruter 85 collaborateurs.

Analyse de succès #2 : Maki (HR Tech, Série A de 26 M€)

Maki a réussi à lever des fonds importants en se positionnant à l’intersection de deux tendances majeures : l’IA et la transformation des ressources humaines.

L’entreprise développe des agents conversationnels basés sur l’IA pour automatiser et améliorer les processus de recrutement.

Facteurs clés du succès :

  • Capitalisation sur la vague IA : Le positionnement « agents IA » a été perçu comme très innovant, promettant une refonte en profondeur des départements RH, en parfaite adéquation avec la tendance d’investissement dominante.
  • Résolution d’un Problème concret : L’IA n’était pas un gadget, mais une solution à un problème tangible et coûteux : rendre le recrutement plus efficace, moins sujet aux biais et libérer du temps précieux pour les équipes.
  • Validation internationale : Le fait que les États-Unis représentent déjà 30% de l’activité a été un puissant signal de validation, démontrant un potentiel global et justifiant une expansion agressive sur ce marché.

Analyse d’un échec (cas composite anonymisé)

Pour comprendre ce qui ne fonctionne pas, il est utile d’analyser le profil type d’une startup qui échoue à lever sa Série A en 2025.

Profil : Une startup SaaS B2B avec un ARR de 800k€, en croissance de 2x d’une année sur l’autre. Sur le papier, ces chiffres semblent honorables.

Raisons du refus lors des Due Diligences :

  1. Inefficacité capitale chronique : L’analyse révèle un Burn Multiple de 3,5x. Pour chaque euro de nouvel ARR, l’entreprise en brûle 3,5. Ce chiffre catastrophique indique que la croissance est achetée à un coût exorbitant.
  2. Méconnaissance des métriques : En réunion, les fondateurs se concentrent uniquement sur la croissance de l’ARR. Ils sont incapables d’expliquer ce mauvais Burn Multiple ou de présenter un plan pour l’améliorer ce qui constitue un « red flag » majeur sur la qualité du pilotage.
  3. Marché de niche sans défendabilité : Le produit est perçu comme un « nice-to-have » sur un marché encombré. La startup ne parvient pas à articuler un avantage concurrentiel durable qui justifierait l’investissement.

Les « Red Flags » rédhibitoires en 2025

Dans le climat d’investissement actuel, certains signaux d’alarme sont devenus rédhibitoires. Ils peuvent mettre fin à un processus de discussion presque instantanément.

Les signaux d’alarme quantitatifs

  • Un Burn Multiple > 2.5x : C’est le signe d’une « fuite en avant ». Le modèle de croissance n’est pas maîtrisé et brûle beaucoup trop de cash.
  • Un CAC Payback > 18 mois : Le temps nécessaire pour rentabiliser un client est trop long. Cela met une pression insoutenable sur la trésorerie et remet en cause la viabilité du modèle.
  • Un Net Revenue Retention (NRR) < 100% : C’est l’un des pires signaux pour un SaaS. Cela signifie que l’entreprise perd de l’argent sur sa base de clients existante. Il est impossible de construire une croissance saine sur de telles fondations.

Les signaux d’alarme qualitatifs

L’équipe et la vision

  • Fondateurs non « coachables » ou arrogants : Le refus d’écouter, une certitude excessive ou l’incapacité à se remettre en question sont des défauts rédhibitoires.
  • Manque de transparence : Toute réticence à partager des informations clés ou toute réponse évasive brise immédiatement la confiance.
  • Incompréhension du métier de VC : Un fondateur focalisé uniquement sur la valorisation et qui ne voit pas l’investisseur comme un partenaire stratégique montre un désalignement d’intérêts.

Le produit et le marché

  • Ignorance de la concurrence : La phrase « nous n’avons pas de concurrents » est un signe quasi certain d’une analyse de marché superficielle.
  • Dépendance excessive : Un seul client représentant plus de 20-25% de l’ARR constitue un risque de concentration trop élevé.
  • Déconnexion du client : Un fondateur qui n’est pas en contact permanent et direct avec son marché navigue à l’aveugle.

Les signaux d’alarme structurels

  • Une table de capitalisation « sale » : C’est un « tue-l’amour » instantané. Une Cap Table trop diluée, avec des clauses complexes ou des erreurs, est un cauchemar administratif que les VCs fuient.
  • Un processus de levée qui s’éternise : Si une startup cherche activement des fonds depuis plus de 6 à 9 mois sans succès, cela crée un « signal négatif » sur le marché qui rend la conclusion d’un deal encore plus difficile.

Conclusion : la checklist stratégique pour préparer sa série A

La Série A de 2025 marque la fin d’une époque. Ce n’est plus un tour de financement destiné à acheter de la croissance, mais un investissement visant à déployer à grande échelle une machine de croissance déjà efficace. L’efficacité a supplanté la seule vélocité.

Pour les entrepreneurs qui préparent ce jalon, la feuille de route est exigeante mais claire. Elle peut être résumée en une checklist stratégique :

  • Maîtrisez vos chiffres comme votre produit. Connaissez votre ARR, Burn Multiple, CAC Payback, LTV/CAC et NRR sur le bout des doigts. Soyez prêt à les défendre et à présenter un plan d’amélioration crédible.
  • Construisez une histoire de croissance efficace. Votre narration doit raconter l’histoire de l’efficacité avec laquelle vous atteignez votre croissance, en mettant en avant les métriques qui le prouvent.
  • Structurez votre approche IA & ESG. Dépassez les déclarations d’intention. Démontrez la création de valeur de l’IA et mettez en place des politiques ESG claires avec des indicateurs de suivi. C’est une preuve de maturité.
  • Validez votre « défendabilité ». Articulez avec une clarté absolue pourquoi votre avantage concurrentiel est durable, qu’il soit technologique, commercial, lié à des effets de réseau ou à une marque.
  • Nettoyez votre maison. Assurez-vous que votre structure juridique est impeccable, que votre table de capitalisation est simple et juste, et que votre data room est professionnelle avant même le premier contact.

Le mot de la fin revient à Jean de La Rochebrochard, dont la pensée capture l’essence de ce nouveau monde : « Les gens dépensent plus l’argent qu’ils ne l’investissent. […] L’obsession [du VC], c’est le rendement. » Pour les fondateurs qui intégreront cette obsession au cœur de leur stratégie, la Série A restera une formidable opportunité de bâtir les leaders de demain.


Sources et Bibliographie

Pour la rédaction de cet article, nous nous sommes appuyés sur les publications et données des institutions de référence suivantes :

  1. France Invest & Grant ThorntonActivité du capital-investissement français en 2025
  2. AtomicoThe definitive take on Europe’s tech ecosystem – 2024
  3. EYBaromètre EY du capital risque en France – 1er trimestre 2025
  4. Serena Capital / MeetyourmarketBenchmarks quantitatifs spécifiques aux startups SaaS
François Wantz Rédacteur en Chef de Finsquare

François Wantz

Cet article a été rédigé par François Wantz, Directeur de la publication pour le média Finsquare. François Wantz supervise la validation des sources de données, la structuration des études comparatives et s’assure de l’objectivité de chaque publication.

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